Si ses (més)aventures, publiées sous forme de feuilleton, ont eu un succès retentissant dès leur parution, l’histoire du pantin de bois indocile a connu un regain de popularité à partir des années quarante grâce au chef-d’œuvre de Walt Disney. La version hollywoodienne s’éloigne pourtant sensiblement du roman d’origine : le petit garçon naïf au cœur tendre du maître américain diffère radicalement de celui, insupportable, imaginé par Carlo Collodi.
C’est à partir de cette vision moins « sympathique » du personnage que le dramaturge Édouard Signolet a choisi de composer sa version de Pinocchio. Ici, le jeune pantin de bois, têtu, malpoli et ingrat, vit des aventures, qui le conduiront à évoluer et grandir. Mais son parcours est parsemé d’embûches et de créatures malveillantes. C’est face à sa propre monstruosité qu’il parviendra à s’humaniser, soutenu par beaucoup d’amour et un soupçon de magie.
Pour donner vie à Pinocchio, digne héritier des personnages de la commedia dell’arte tels Arlequin et Polichinelle, Édouard Signolet nous entraîne dans un tourbillon de couleurs, de sons et de personnages en créant une ambiance balançant entre fête foraine et cabaret berlinois. Dans cet univers à la fois festif et crissant se succède une farandole d’êtres magiques et maléfiques, cruels ou bienveillants, interprétés par trois comédiens qui endossent le rôle de bonimenteurs. Comme sur un stand de foire, ils apostrophent le public, jouent avec ses attentes en ménageant les effets d’annonce et le suspens, l’abreuvent de paroles, emploient toutes sortes de recettes pour lui vendre leur histoire.
Dans ce remue-ménage haut en couleur, des compositions originales de Mélie Fraisse dialoguent avec des grandes pages du répertoire classique, parmi lesquelles le Concerto n° 23 pour piano de Mozart, La Danse des Mirlitons de Tchaïkovski, L’Été de Vivaldi ou encore la Marche funèbre de Chopin. Des chansons complètent ce joyeux mélange de styles, dont Fais pas ci, fais pas ça de Jacques Dutronc et Youkali de Kurt Weill.
D’une grande intensité dramatique, Pinocchio joue avec les genres, de façon à présenter aux enfants toutes les facettes du chef d’œuvre de Collodi en leur offrant une écoute réjouissante et captivante.